Mentawaï! – Jean-Denis Pendanx et Tahnee Juguin

Etre un peuple autochtone devient un risque de plus en plus important. D’autant quand on vit dans la foret et que cette dernière possède une grande richesse. Les mentawaïs ont trouvé un moyen de se protéger avec les touristes.

4e de couverture
Dans l’île de Siberut, en Indonésie, les Mentawaï luttent pour conserver leur mode de vie, en totale communion avec la nature, au coeur de la jungle. Profondément animiste, malgré une assimilation à marche forcée mise en oeuvre par les régimes indonésiens successifs, la tribu des Mentawaï s’évertue à conserver ses traditions séculaires, et à les transmettre. La jungle constitue la première ressource de ses habitants, et la vie est quotidiennement ponctuée de cérémonies chamaniques destinées aux soins et au maintien de l’harmonie au sein des familles.
Tahnee Juguin parle le mentawaï et vit une partie de l’année avec eux. Jean-Denis Pendanx l’a accompagnée pendant son dernier séjour dans la jungle, en 2018. Tous deux livrent ici, entre documentaire et fiction, un récit de haute volée.

Mon avis
On se doute bien qu’il y a un problème quand on trouve une bande dessinée qui a pour titre le nom d’un peuple autochtone. La couverture surprend quand on voit la nature prégnante et un homme en haut d’un arbre, une caméra à la main. Une fois que l’on ouvre l’ouvrage, la préface explique le contexte. En Indonésie, le gouvernement veut faire disparaître les mentawaïs de gré ou de force. Après avoir couper les cheveux des leaders, les emprisonner puis les relâcher, ils pensaient aller plus loin. Mais la présence des touristes changent la donne. Il ne faut pas des images de ces actions, cela donnerait une mauvaise image. Et surtout, les touristes sont une manne financière. D’autant plus qu’ils viennent pour rencontrer ces individus animistes qui conservent des rites traditionnels. Eux-aussi décident de se servir de ces voyageurs en quête d’exotisme pour se protéger et gagner de l’argent. En ouvrant les portes à autrui, il y a un risque de perte de l’authenticité de leur mode de vie. Même si celui-ci a été changé avec l’hôpital à proximité et l’école nationale qui omet volontairement la culture locale. L’acculturation passe part bien des biais.

La force du récit repose sur son réalisme. Tout ce qui nous est raconté repose sur une forme de témoignage, de transmission d’expérience. Un moyen de subsistance des habitants est de se faire filmer, prendre en photo et héberger des étrangers. D’un côté, la problématique de la volonté du récit de ceux qui viennent. La plupart ont déjà une commande d’un récit et les images doivent y correspondre coûte que coûte. La vraisemblance n’a guère d’importance par rapport au divertissement. De l’autre, repose sur le fait que les locaux acceptent cette transgression. D’ailleurs eux-aussi s’approprie ces codes quand ils tournent leurs propres vidéos. Chacun choisit comment il se raconte et transmet son histoire. La réalité existe t’elle? N’est-ce pas seulement un choix de point de vue au final. Ce qui compte vraiment repose sur la trace des pratiques, des chants, du soin… et que cela perdure le plus longtemps possible. Cette bande dessinée est un témoignage qui dépasse les frontières de l’Indonésie. Le lecteur peut s’il le souhaite aussi soutenir financièrement cette sélection d’indépendance. Le message est d’autant plus compréhensible grâce aux dessins et couleurs proche du dessin de terrain. C’est parlant en donnant l’impression d’être plus proche des acteurs.

Rien de tel qu’un voyage en terre inconnue pour changer notre regard sur le monde.

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