La dernière reine – Rochette

Sur le plateau du Vercors, la nature a encore sa place. Certains décident de vivre en harmonie avec elle, ce qui a tendance à ne pas plaire à tout le monde. D’autant plus quand on aime les animaux plus que les hommes.

4e de couverture
Gueule cassée de 14, Édouard Roux trouve refuge dans l’atelier de la sculptrice animalière Jeanne Sauvage. Elle lui redonne un visage et l’introduit dans le milieu des artistes de Montmartre. En échange, Édouard lui fait découvrir la majesté du plateau du Vercors et l’histoire du dernier ours qu’il a vu tué quand il était enfant. Au cœur du Cirque d’Archiane, il lui dévoile la Dernière Reine et incite Jeanne a créer le chef d’œuvre qui la fera reconnaître.
Dans la veine des grands romans feuilletons du 19e, La Dernière Reine croise les destins du dernier ours du Vercors et d’Édouard Roux gueule cassée de 14.
Comme précédemment dans Le Loup, homme et animal se confrontent dans un récit puissant, mêlant questionnements écologiques, féminisme, histoire d’amour et histoire de l’art.

Mon avis
Rochette poursuis son travail créatif autour de la nature et principalement la montagne. Après « Ailefroide, altitude 3954 » et « Le loup », il revient avec « La dernière reine » qui connaît un vrai succès médiatique. Le bédéaste s’est investi pendant 3 ans pour réaliser cette création sortie tout droit de son imagination. Il mélange sa passion pour le Vercors, les conséquences de la guerre, l’art et les esprits étroits de bien des citoyens. A travers quelques voyages temporels, on découvre le rapport de la société principalement à la campagne à ceux qui dérogent à une forme de conformisme sociale. Surtout quand la religion catholique veut s’imposer comme seul dogme à suivre. Tout ceux qui ose la remettre en cause mérite la mort. Quand une femme ose vivre à l’extérieur d’un cercle et vénère ours et loup, cela dérange. Le dessinateur grossit le trait en dessinant un garçon roux. Comme on le disait à l’époque, la marque du diable. L’ignorance permet de mieux manipuler des masses en quête de justice et de violences légitimes. Si le curé ou le policier le dit, c’est forcément vrai. On voit la crédulité des gens prêts à tout pour rester dans des clous. Qu’importe si cela amène à malmener des gens et tuer des animaux rares. D’ailleurs, est-ce que le fait de tuer des loups, ours, lion, éléphant ne valorise pas l’égo mal placé de ces assassins? Une posture qui n’a pas guère changer dans le temps, malheureusement.

Rochette se concentre principalement sur Edouard Roux, gueule cassée de 14-18 et Jeanne Sauvage, une artiste. Lui s’en est sorti de ces boucheries mais complètement défiguré. Comment vivre de façon ordinaire avec un sac qui le cache? On l’invite à rencontrer Jeanne Sauvage, sculptrice animalière, qui réalise des masques pour ces individus. Grâce à elle, un nouveau monde s’ouvre à lui. Comment ne pas y voir un parallèle avec Anna Coleman Ladd qui a réalisé 185 masques dans le monde réel? Une femme d’une humanité et d’une générosité hors du commun. La fiction nous guide vers une histoire d’amour hors du commun. Deux être différents se rapprochant par l’amour de la nature. Progressivement, la force de l’ours les anime. D’ailleurs, elle réalisera une sculpture avec un cours, très inspirant. Le dessinateur a lui aussi réalisé une œuvre pour mieux être proche de son sujet. Il n’hésitera pas d’ailleurs à faire un clin d’oeil à Pompon pour son célèbre ours blanc que l’on peut admirer au musée d’Orsay.

On est touchée en permanence par cette histoire forte remplie à la fois d’amour, d’amitié et de solidarité malgré la haine, les préjugés et la violence. Une injustice criante se tisse sur le fil rouge. Le dessin et les couleurs posées de façon assez brut renforcent ces aspects. Il n’y a rien de lisse ou de parfait, à l’image de la réalité et de la vie. C’est une claque créative que l’on nous propose sans demi-mesure. L’homme est-il vraiment apte à vivre ensemble? Et surtout est-il prêt à accepter des animaux dans leur milieu naturel au risque de perdre quelques animaux d’élevage dont l’état leur rembourse leur perte et des prises en moins pour les chasseurs? Un soufflet d’humanité pour espérer des lendemains plus heureux et tolérants.

Une oeuvre singulière, forte et dense qui va marquer chaque lecteur. Etes-vous prêts à cela?

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