L’homme est un accident – Enki Bilal et Adrien Rivierre

Enki Bilal n’est pas un artiste comme les autres. Il a su se faire connaître aussi bien auprès des adeptes du 9e art, du 7e art et des autres. Pour en savoir plus sur cet homme hors du commun, rien de tel qu’un entretien avec Adrien Rivierre.

4e de couverture
« J’ai intégré la notion de surprise, d’accident – je préfère ce mot – dans ma propre création. Je le répète, ainsi, la fin de l’humanité s’installe en moi comme une intuition du présent. » Enki Bilal pense que l’Homme est l’accident le plus tragique qui ne soit jamais arrivé à notre planète Terre. La destruction écologique semble inévitable et, avec elle, c’est l’extinction de notre espèce qui est en jeu à brève échéance. Cette intuition et cette angoisse, l’artiste les a transformées pour créer un univers foisonnant, onirique et déglingué qui a marqué des générations entières. Mais cette fois, Enki Bilal ne prend pas le crayon ou le pinceau, il déploie sa vision du monde par les mots. Interrogé par Adrien Rivierre sur les sujets brûlants de notre époque, il se confie sans concession, avec une liberté rare et une lucidité qui bat en brèche la bien-pensance. Il n’est plus seulement un artiste de l’imaginaire, mais aussi un lanceur d’alerte qui semble, mieux que quiconque, sentir et ressentir le monde qui vient. Tout sauf une incitation au fatalisme, son propos résonne comme un appel à se réveiller, vite, pour éviter le pire.

Mon avis
Enki Bilal fait parti des artistes qui m’ont fait découvrir le 9e art quand j’étais adolescente. Par conséquent, j’ai un rapport assez particulier qui m’a permis de m’enrichir d’un médium qui depuis m’accompagne. Sans oublier, de voir l’incroyable imagination que possède un créatif avec une retranscription scénaristique et surtout graphique. Je suis tombée amoureuse du bleu. Comment ne pas être piqué de curiosité quand on découvre des échanges où l’on en découvre plus sur une oeuvre riche et complexe. Malgré des bd de fictions, on peut y lire des révoltes liées à la politique, à la géopolitique, la religion, le populisme, les extrémistes, la misogynie… C’est un homme de conviction. « La prise de conscience qui doit être la nôtre est celle de ce que j’appelle une « platétologie ». Je préfère ce terme à celui d’écologie car il dit plus immédiatement encore le défi auquel nous faisons face et la posture au monde que nous devrions adopter : la défense de la planète tout entière ».

Par conséquent, les ramifications sont nombreuses. « L’écologie politique se trouve nécessairement plongée et embourbée dans un combat électoral permanent. Elle doit s’arranger avec d’autres systèmes pour conquérir le pouvoir. Concrètement, certains des récents maires écologistes français se retrouvent à remettre en cause l’organisation du Tour de France ou la tradition du sapin de Noël pour marquer leur territoire idéologique. Les mêmes se sentent obligés de renvoyer l’ascenseur à une partie de leurs électeurs, dont certains peu fréquentables […]. Cette attitude porte un nom : le clientélisme. » Par conséquent, la prévention doit se faire dans un autre cadre qui devrait être moins influençable. « L’éducation de la dernière chance, supervisée par des non-politiques. Je pense que les nouvelles générations sont prêtes pour ce genre.. d’utopie ». Il faut insister sur l’apprentissage du passé pour éviter de refaire les mêmes erreurs. Les facultés d’oublie des gens est incommensurable. Apprenons-nous vraiment des erreurs d’avant? L’Histoire prouve que non.

Il faut s’inspirer de la littérature SF. « Le meilleur des mondes » d’Huxley est une vraie source d’inspiration. « Huxley imagine en effet une société inégalitaire, organisée en castes sociales, eugéniste et dirigée par les scientifiques, où les rêves transhumanistes côtoient le Soma, une drogue qui permet d’être éternellement heureux. Je dirais aujourd’hui qu’il est déjà dépassé car nous prenons tout droit le chemin du transhumanisme et le le numérique est une forme de drogue qui compte nous anesthésier de bonheur. Dans « La Foire aux immortels » en 1980, quand j’imagine le personnage grotesque de Ferdinand Choublanc qui souhaite atteindre l’immortalité, « dussé-je- en mourir! » dit-il, je n’imagine pas autre chose que ce que Ray Kurzweil a en tête. Il annonce que tous les cinq à dix ans, nous ferons une révision de notre corps comme nous le faisons pour nos voitures ».

En tournant les pages, aucun optimisme ne transparaît. D’ailleurs, pourquoi devrait-il en avoir? Il dresse un bilan assez lucide où il n’est guère possible d’espérer du mieux. Comment lutter contre le populisme, la haine, la colère, la simplification, l’oublie, le communautarisme, les extrémistes, le besoin de reconnaissance sociale, le pouvoir, l’argent, l’hypocrisie institutionnelle…? Il est tellement facile de voir ces prises de partie déprimante partout et même dans notre entourage proche. L’actualité quotidienne a tendance à donner raison que l’on ne peut qu’aller vers l’effondrement. L’ensemble des parties prenantes fait souvent consensus face à des enjeux dont le quidam n’a aucune connaissance. Donc si vous souffrez de solastalgie, passez votre chemin. Par contre, les apartés d’Adrien Rivierre sur les oeuvres d’Enki Bilal donne furieusement envie de se replonger dans l’intégralité de sa production et dans l’ordre chronologique.

Un livre intéressant et percutant qui donne à voir l’environnement et la fiction d’un autre regard.

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