Définir simplement l’évolution s’avère très compliqué. Rien de telle qu’un voyage qui mêle Histoire, littérature et science pour en proposer une vision assez large. On comprend mieux pourquoi le monde d’hier ne sera pas le monde de demain.
Créer une pièce de théâtre pourrait déjà sembler un défi. Mais monter une pièce qui mélange Darwin, « Les voyages de Gulliver » de Jonathan Swift et « Les hommes-chevaux » de Restif de la Bretonne peut paraître très audacieux. Il faut impérativement tous ces auteurs et chercheurs pour évoquer l’évolution, l’eugénisme, l’obscurantisme, transhumanisme… La création du monde était relativement simple dans la description des religions monothéistes. « Pour avoir suggéré une parenté entre l’homme et les singes, le prêtre italien Giulio Cesaré Vanini eut la langue arrachée avant d’être brûlé vif en place de Toulouse, le 9 février 1619. » Les hommes se sont interrogés aussi bien pour comprendre le ciel, le sol ou les animaux. Même s’il faut garder l’angle biblique, des théories commencent à émerger avec d’autres nuances. La pièce risque ne pas être présenté. Des parents du collectif « Les Combattants de la Création » s’opposent à ce qu’on évoque l’idée que l’Homme descend du singe. Ces idées ont toujours cours et continueront à exister. Des spécialistes eux essaient de prévoir l’avenir avec le transhumain. « Oui se sera.. la mort de la mort ». Tout le monde ne pourra pas en profiter. A nouveau, il va y avoir une sélection. Le classement des espèces est toujours importantes que cela soit par l’anatomie ou soit par l’ADN. Les évidences ne sont pas toujours exactes. Ainsi on se met à se surprendre et à développer son esprit critique. Même les ultra-religieux peuvent s’interroger avec de nouveaux arguments.
Une bande dessinée d’une grande richesse de connaissances. Jean-Baptiste de Panafieu se définit comme un vulgarisateur scientifique et ce n’est nullement usurpé comme terme. Il évoque beaucoup l’obscurantisme religieux qui est toujours très présent dans notre société. Peut-être trop d’ailleurs, car c’est évoqué tout au long du récit. Est-ce si importante de faire la part belle aux intégristes? Méritent-ils autant de place? La genèse n’est plus la référence auxquelles on rattache toutes les savoirs. Cuvier pose les bases de la paléontologie et il rivalise avec Lamark. Quand Charles Darwin publie « L’origine des espèces » cela produit un raz-de-marée dans le monde. Des théories sont proposées dans le monde entier. La science permet de changer le rapport au monde et de nos jours cela n’a pas changé. Le fait d’avoir choisit une pièce de théâtre pour parler de l’évolution se montre très ingénieux. En expliquant la mise en scène ou le choix du texte, il est possible d’expliquer simplement l’Histoire et les recherches. Une façon élégante pour le lecteur pour apprendre ou réviser ces notions d’un autre temps. Grâce à l’avancée des interrogations et des rivalités personnelles, le monde prend un autre visage. Le scénariste fait un clin d’œil discret et éloquent sur la présence des femmes comme Rosalind Franklin. L’effet Mathilda est passé par là. Il n’omet pas non plus la vision futuriste avec le transhumanisme qui fait aussi très polémique actuellement. L’angle de la compréhension de l’évolution des espèces a traité de ces origines à nos jours. Une prouesse de rassembler cela en 127 pages. Le travail de Alexandre Franc y est pour beaucoup. Le dessinateur assez classique dans son trait introduit des graphiques, des photos, des extraits de texte, des représentations d’époque. Le fait que le récit se déroule à différents endroits favorisent le dynamisme de lecture avec des paysages riches et variés. Un duo à nouveau très complémentaire après « Extinctions, le crépuscule des espèces » qui a su trouver ses marques pour le plaisir des lecteurs et lectrices.
Une façon originale et peut-être un peu autoritaire d’asseoir une pensée qui s’affirme sur l’évolution et accepte peu de contradiction.