Paul Grappe et Louise Landy tombent amoureux et décident de se marier. Le papier signé, il part au front. L’horreur est tellement intense qu’il fuit et doit survivre caché.
En essayant d’aider un ami sur le champ de bataille, se dernier se jette sous les balles ennemies. Sous l’ordre de son supérieur, il doit le suivre. Ils se cachent dans un trou d’obus mais son ami va se faire arracher la tête devant ces yeux. Il ne peut supporter de voir encore ces horreurs et va alors se couper un doigt. Pour éviter qu’il soit renvoyer combattre, il infecte en continue la blessure. Le supérieur n’est pas dupe et veut le renvoyer le lendemain faire son devoir. Impossible de retourner dans cette boucherie. Alors il fuit et va se réfugier chez son épouse. Très vite, il tourne en rond dans cette petite chambre de bonne et s’en prend à son aimé. Puis lui vint une idée. Et s’il se travestissait en femme? Il a trouvé la technique pour passer inaperçu. Progressivement, il prend ces aises dans la peau de Suzanne jusqu’à aller à toutes les libertés sexuelles possibles. Le couple va exploser jusqu’à atteindre les limites du raisonnable.
Chloé Cruchaudet possède un sacré talent de dessinatrice et de conteuse. Elle relate cette histoire vraie, inspiré d’un essai des historiens Fabrice Virgili et Danièle Voldman (« La Garçonne et l’assassin« ) avec un coup de pinceau intense. Elle débute dans un tribunal pour nous raconter le récit de ce couple surprenant et la décision de cette femme pour devenir libre. C’est avec une étonnante réalité que la description de la transformation du mari en femme est proposée. Le terme de l’époque est inverti et c’est illégale tout comme la sexualité. Les mœurs se libèrent plus vite que la loi. Le puritanisme n’est jamais très loin. Dans les bois, chacun peut trouver une liberté, sans limite et sans jugement. L’esprit est très bien retranscrit où l’on sent la tension, la peur, le plaisir… L’auteure après de nombreuses recherches sur l’esthétique de l’époque nous propose des dessins qui évoquent la folie d’une époque avec une grande maîtrise du noir et blanc avec une nuance de rouge. Elle n’oublie pas d’évoquer les violences conjugales, le traumatisme de guerre, les gueules cassées, l’abolie de culpabilité pour les déserteurs.. Elle contextualise tout aussi bien la période, le contexte, les sentiments, la peur, la passion… Un album très bien pensé du début jusqu’à la fin qui ne peut laisser personne indemne.
Une lecture mémorable qui montre les limites de l’amour et de la société.