Le Gourmet solitaire – Jirô Taniguchi et Masayuki Kusumi

Unknown

Les japonais aiment beaucoup les étrangers, et on vit très bien comme travailleur émigré au Japon… surtout si on n’est pas noir, pas Chinois, pas Coréen, pas une femme, pas un homosexuel, pas asiatique, pas musulman et pas Américain.

La nourriture au Japon se range en deux grandes catégories, selon sa fonction : celle que l’on prend pour se restaurer et celle que l’on prend pour accompagner l’alcool. Plus précisément, sans riz, les mets s’articulent autour de l’alcool qu’on boit en grignotant. Un gourmet qui ne boit pas d’alcool est une sorte de loups solitaire. L’empêcher de prendre du riz et de faire un repas licite, quand tout le monde autour de lui boit, c’est comme lui rappeler agressivement son « orientation gustative ».  

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4ème de couverture
On ne sait presque rien de lui. Il travaille dans le commerce, mais ce n’est pas un homme pressé ; il aime les femmes, mais préfère vivre seul ; c’est un gastronome, mais il apprécie par-dessus tout la cuisine simple des quartiers populaires… Cet homme, c’est le gourmet solitaire. Chaque histoire l’amène à goûter un plat typiquement japonais, faisant renaître en lui des souvenirs enfouis, émerger des pensées neuves, ou suscitant de furtives rencontres. Imaginé par Masayuki Kusumi, ce personnage hors du commun prend vie sous la plume de Jirô Taniguchi. Le Gourmet solitaire est un mets de choix dans la collection Sakka.

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Première surprise en ouvrant le livre, il se lit comme un véritable manga. On commence par la fin en lisant de droite à gauche. Un choix surprenant pour Casterman qui a édité bien d’autres ouvrages de l’auteur dans le sens de lecture français. Peut-être que le plongeon dans la véritable culture japonaise à imposer ce sens de lecture. Cela ne me gène absolument pas.

Puis le livre débute par une introduction du traducteur, chose rare qui rend hommage avec bonheur à l’histoire qui va suivre. « Le Gourmet solitaire, il faut le lire comme on voit et revoit dix fois un film qu’on aime. Un film d’Ozu… ou de Truffaut, de Cassavetes, de Tarkovski… Lu comme on lit trop souvent une BD, à la va-vite, en surfant sur les images, vous passeriez à côté du meilleur. Comme on boit un grand vin, oui, c’est çà. Imaginez un grand bourgogne, ou même pas.. disons un honnête Valençay. C’est en sifflant un verre culsec que vos papilles vont réussir à trouver les notes florales, le pamplemousse, le persillé, n’est-ce pas? Et bien, Taniguchi, c’est pareil. Ce n’est pas de la BD fast-food, c’est le cas de le dire. C’est de la cuisine du patron, c’est du pot-au-feu de la grand-mère de Limoges, et parfois, c’est des cerises au sirop d’Alphonse Daudet. » Par moyen de ne pas comprendre. D’accord, je vais prendre mon temps pour lire, voir et écouter.

Voilà maintenant, je suis confortablement installée dans mon canapé, je pourrais presque me préparer un thé fumé. L’homme vagabonde toujours seul à la quête d’endroits pour se restaurer. L’obsession qu’il partage avec nous, c’est celle de combler son estomac. Comme d’habitude avec Taniguchi, on apprécie le plaisir de la marche, de la solitude, de prendre son temps, de se laisser porter par la hasard. Le voyage culinaire avec les algues nori des rochers, peau de tôfu crue à la kyôtoïte, manjû grillé, shûmaï, sanchu, sukiyaki, algues hijiki bouillies m’a emmené vers des saveurs qui me sont totalement inconnues.

Je découvre des plats dans un grand calme, une certaine douceur où se mélange l’émotion et les souvenirs. Je tente en vain de regarder les personnages, de m’imaginer dans les restaurants, de convertir les yens en euros. J’essaie de percevoir le chant des oiseaux, le bruit de la mer, le cri des clients disant ce qu’ils souhaitent manger… Les pages se tournent simplement, avec lenteur. Zut plus d’histoire. Cela se conclue par une postface de Masayuki Kusumi qui fait l’apogée de la nourriture, du bien-être que cela lui produit…

J’avoue avoir eu quelques peurs à la lecture, c’est pour cela d’ailleurs que j’ai repoussé sa lecture. Maintenant, j’ai très envie de découvrir la vraie nourriture japonaise, pas celle que l’on trouve forcément partout avec sushi ou brochette. Un jour peut-être j’adorerai les desserts aux haricots rouges aussi. Une belle balade culinaire qui m’a fait voyager.

Adaptation
Drama de 12×24 minutes diffusé sur TV Tokyo en 2012, scénarisé par Masayuki Kusumi qui apparaît à la fin de chaque pour épisode pour présenter le restaurant qui a servi de décor.

D’autres livres de Jirô Taniguchi
L’homme qui marche
La montagne magique
Le promeneur
Un zoo en hiver
Quartier Lointain
Un ciel radieux 
Le journal de mon père

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