
Les industriels ont créé des produits assemblant sucre et gras. Un mélange qui n’existe pas à l’état naturel et qui rend accro. Une addiction dangereuse bien souvent méconnue même du corps médical.
Zazou s’informe et tombe sur des informations qui l’a déroute. Le sucre peut-être une drogue. Des études sur les rats en sont la preuve indiscutable. « P’tet que la malbouffe agit comme une drogue en fait. Et que certains obèses sont des toxicomanes comme les autres. Avec les mêmes altérations dans les même zones du cerveau ». Elle trouve un peu par hasard un tract des FA, des food-addicts en rétablissement anonymes, sur lequel il y a une dizaine de questions. A sa grande surprise, ses réponses révèlent des choses sur elle dont elle ne souhaite pas le conscientiser. Elle balance le papier par terre et continue son chemin furieuse. Bambi la coupe dans son élan pour l’interpeler. En retour, elle aura le droit à de l’agressivité, de la violence et de mauvaise foi. Il en faudrait plus à cette jolie blonde pour tourner les talons. Ces réactions sont la routine. Grâce à sa patience et son tact, elle va guider la turbulente vers le chemin de la raison. Pour ça, rien de telle que faire partie d’un collectif qui ressemble à celui des alcooliques anonymes mais accro à la bouffe trop grasse, trop sucrée et trop salée. Les ellipses permettent la création d’un récit chorale donnant la parole à Winnie la bingeuse compulsive, Némo le mangeur émotionnel, Clochette l’accro au sexe et au sucre… Même si la plupart possède des corps de rêve, ils ont tous des problèmes très toxiques au sucre, glucide et drogues diverses. Vouloir s’en sortir demande une grande exigence et ne pas céder à la tentation présente partout. La jeune adulte impétueuse se sent moins seule et à la fois est troublée. Comment changer son rapport à son corps? Comment accepter son regard critique sur soi? et celui des autres? Comment changer son rapport à la nourriture?

Deux évènements ont donné envie à Emilie Gleason de se lancer dans la création de la bande dessinée « Junk Food ». La première avec la venue de plusieurs de ces cousins du Mexique en France qui ont rajouté des cuillères de sucre dans leur Coca Cola. Le goût leurs semblait un peu fade. Et la seconde est la lecture de « Sucre : l’autre poudre » de Bernard Pellegrin qui évoque aussi bien l’industrie agro-alimentaire et son lobby. Elle a compris que le sucre n’étaient un élément ordinaire et qu’il avait une vraie influence sur les gens. La décision est prise, elle doit en parler dans son art de prédilection, la bande dessinée et avec humour. En 2019, la dessinatrice prend contact avec Casterman pour lui proposer son projet. A ces côtés, Arthur Croque, journaliste qui entreprend des plus amples recherches et aident la créatrice à explorer ce monde complexe. Pour se rendre compte du problème et des différents aspects que peut prendre l’addiction, ils ont choisi de retranscrire des témoignages réels recueillis au quatre coins du monde. Tous sont regroupés autour d’un groupe imaginaire de food addicts anonymes. Le récit ne peut pas laisser insensible et va vraiment inciter à réfléchir sur sa consommation et celle de l’entourage. Même si à la fin on trouve des sources, on ne les découvre pas dans le récit même quand il est question de chiffres par exemple. C’est dommage car cela donnerait plus de crédibilité. Au point de vue graphique, c’est le point fort autant que le point faible. On dirait un style qui n’est pas sans évoquer les comics voir même les comix. Ca va piquer gravement la rétine des puristes de la ligne claire. Pas de case, pas de délimitation, des personnages difformes, des couleurs pétantes… Une prise de partie audacieuse qui en séduira plus d’un.
Une bande dessinée qui ose aborder un sujet assez tabou et pourtant qui concerne une grande partie de la population.

Laisser un commentaire