
Dans cet album documentaire, Cécily de Villepoix nous plonge dans les coulisses des grandes découvertes scientifiques, loin des mythes héroïques. À travers des récits éclatés et des anecdotes aussi fascinantes que déroutantes, elle révèle les savant.e.s oubliés derrière les avancées majeures. Le récit redonne une dimension humaine, faillible mais inspirante, à ces moments fondateurs.
4e de couverture
Elles ont bouleversé le monde et pourtant, il s’en est fallu de peu pour que l’humanité passe à côté : les grandes découvertes scientifiques sont souvent le fruit de drôles de concours de circonstances ou d’histoires cocasses. Comment a-t-on découvert l’anesthésie, l’existence de » porteurs sains » ou encore les mécanismes à l’oeuvre dans la digestion ? Un peu par hasard ou par intuition. Celle de savants audacieux, et parfois peu scrupuleux, que l’histoire a oubliés. On se souvient de Pasteur, mais qui connaît Jenner, l’inventeur de la vaccination ? Ou encore Margaret Crane, à l’origine du premier test de grossesse ? Et que dire d’Horace Wells, dentiste à l’origine des opérations sous anesthésie qui a mené ses premières expériences sur … lui-même. Est-il encore question de science ou d’inconscience ? La question se pose aussi pour Philip Zimbardo et sa redoutable expérience psychologique » l’effet Lucifer « . Car parfois les découvertes échappent à ceux qui en ont la paternité…

Mon avis
La lecture de l’album nous entraîne dans quatorze histoires courtes, classées en quatre chapitres thématiques : des « heureux hasards » (comme l’anesthésie ou la digestion), aux découvertes échappant à leurs auteurs, jusqu’aux expérimentations éthiquement controversées ou aux pratiques douteuses comme l’homéopathie. Chaque épisode est valorisé par un trait semi‑réaliste aux accents naïfs, qui sait alterner entre schéma explicatif, caricature et bande dessinée classique pour mieux communiquer et varier les plaisirs visuels. La démarche vulgarisatrice de Cécily de Villepoix se révèle ici très pragmatique. Elle ne se contente pas d’exposer, mais interroge également la morale et la mémoire des sciences, qu’il s’agisse de la vaccination, du DDT ou encore de l’effet Lucifer.
Ce qui frappe, c’est la capacité de l’album à évoquer des figures méconnues comme Margaret Crane, Horace Wells ou « Typhoïd Mary » tout en offrant un regard lucide sur les ambivalences des progrès scientifiques. C’est une bande dessinée exigeante, qui ne fait pas l’économie des zones d’ombre avec les découvertes dérivées, les expérimentations douteuses, l’exploitation des corps. Dorénavant, on sait comment le spéculum a été inventé avec des expériences sur des femmes esclaves noires. Le ton léger, parfois malicieux, permet de désamorcer la complexité des sujets pour rendre la science accessible, sans jamais la banaliser ou la travestir. Une belle découverte pour avoir un autre regard sur la science qui n’est pas si honorable dans ces recherches.
Au petit bonheur la science est une bande dessinée documentaire riche et engagée, qui marie habilement curiosité intellectuelle et finesse graphique. Elle suscite le doute tout en éduquant, invitant à interroger la légende des découvertes et à célébrer ceux que l’histoire a trop vite oubliés. Un ouvrage passionnant, aussi instructif que stimulant pour tous les esprits – jeunes et moins jeunes.
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