22h05 rue des Dames

Quand on est un mafieux, c’est important de se projeter dans l’avenir. La présence d’extraterrestre peut tout remettre en cause. Par conséquent, il faut agir rapidement pour garder la main sur un marché fluctuant.

4e de couverture
Treize des plus riches personnalités du monde engagent un tueur à gages pour éliminer trois personnes parmi les plus pauvres. Hua Tang accepte le contrat mais s’interroge sur leur dangerosité. Est-ce lié aux étranges distributions populaires de sacs remplis de millions ? Ou bien aux extraterrestres qui se font appeler les Dieux et survolent inlassablement notre Terre depuis cinq ans ?

Mon avis
Se lancer dans la lecture d’un tome de la série « Les futurs de Liu Cixin » est toujours une aventure. La qualité est très variable. Mais avec « Nourrir l’humanité » nous sommes agréablement surpris. On retrouve la finesse de l’écriture de Liu Cixin avec la critique de la société de consommation et de la destruction de la nature. Sylvain Runberg choisit de raconter l’histoire avec plusieurs flashbacks avec d’un côté une population vivant sur une autre planète et de l’autre, on suit un tueur à gage. Comme ça, il n’est pas évident de faire le lien entre les deux. Le scénariste arrive très bien à construire son récit ainsi car on voit progressivement les implications de l’un et l’autre. Des extraterrestres possèdent une technologie supérieure à celle de la Terre. Par conséquent, elle se prend le droit d’imposer quelque chose sans l’accord des habitants. Une consigne est passée. Un niveau de vie sera imposé en prenant en compte les plus pauvres. Par conséquent, les plus riches ne veulent pas perdre tout l’argent accumulé. Ils donnent à tous les pauvres. Est-ce que cela rend les gens plus heureux? Est-ce qu’ils arrivent à plus se projeter sur le long terme? Bien au contraire, ils privilégient le court terme.

Un jeune gamin formé à tuer voit le monde d’un regard cynique et avec peu d’espoir. Il a vu son père tuer sa mère car sa vie était un désastre. Alors il a tué son père et a commencé une formation pour assassiner tous ceux qu’on lui ordonne. Quand il doit abattre son boss et il le fait sans scrupule. Ce magnat de la drogue, de la prostitution et de la traite humaine ne manquera pas à grand monde tout comme les autres chefs de clan. Il a fait un grand nettoyage avant l’arrivée d’extraterrestres jetés de leur planète. Ils ont développé des technologies pointus et dorénavant les robots font tout le travail. Un homme bénéficie de tous les services et laissent mourir les autres. Il leur fait payer l’air qu’ils respirent et la nourriture. Désargentés, ils meurent les uns après les autres. La Terre est similaire et toute la population pourrait s’y adapter. Est-ce possible? Les humains refusent et cela génère des conflits sanglants sans fin. Un petit groupe d’irréductible décide de prendre la vie avec philosophie car après avoir accumulé des cadavres dans le cadre professionnel. Ils peuvent profiter de la tranquillité en vivant humblement. Le secret est de ne pas en vouloir trop.

L’aspect écologique est bien entendu de mise. L’humain détruit son environnement pour toujours se faire de l’argent. Cela engendre de la grande misère dont certains profitent, bien entendu. Toute ressemblance avec la réalité n’est pas fortuite. Quand Hua Tang demande à un de ces contrats pourquoi elle refuse de prendre des milliers de dollars la réponse l’interroge : « Ces décharges sont autant d’affronts fais à la nature que nous, terriens, pillons et détériorons sans fin. Qu’est-ce que j’en ferais…? Consommer plus et abîmer encore davantage notre planète…? Vivre parmi ces déchets est ma manière de racheter notre conduite envers la nature. C’est pour ça que je ne veux pas de cet argent. » (p. 103). L’auteur chinois et le scénariste insistent sur cet aspect. Miki Montllo propose un univers graphique assez réaliste et en accord avec notre époque. Il n’est pas difficile de se projeter. Il montre la nature d’un côté luxuriante et de l’autre côté les déchetteries. Les couleurs terne possède une forme de luminosité. Un juste milieu très adéquat au contexte. Un duo complice qui sublime la nouvelle de Liu Cixin.

Un tome futuriste qui montre que l’Homme est son pire ennemi. Les extraterrestres permettent de révéler la vraie nature du monde.