Pauline Harmange décide de partager son avis concernant les relations femmes-hommes. Elle n’hésite pas à être très tranchée dans son opinion. Pour elle, il n’y a aucune raison à cacher sa misandrie. Pourquoi les hommes devraient les seuls à trouver normal la misogynie?

4e de couverture
« Je vois dans la misandrie une porte de sortie. Une manière d’exister en dehors du passage clouté, une manière de dire non à chaque respiration. Détester les hommes, en tant que groupe social et souvent en tant qu’individus aussi, m’apporte beaucoup de joie – et pas seulement parce que je suis une vieille sorcière folle à chats.
Si on devenait toutes misandres, on pourrait former une grande et belle sarabande. On se rendrait compte (et ce serait peut-être un peu douloureux au début) qu’on n’a vraiment pas besoin des hommes. On pourrait, je crois, libérer un pouvoir insoupçonné : celui, en planant très loin au-dessus du regard des hommes et des exigences masculines, de nous révéler à nous-mêmes. »
Pauline Harmange est autrice et militante féministe. Elle écrit sur le blog « Un invincible été ». Moi les hommes, je les déteste, un premier essai menacé d’interdiction.

Mon avis
L’essai se distingue par sa sincérité et son audace. Pauline Harmange assume pleinement le titre provocateur et s’en sert comme d’un levier pour interroger les rapports de genre et la place des hommes dans les dynamiques patriarcales. « C’est bien connu : il suffit de fréquenter des femmes pour être automatiquement lavé de tout sexisme… Ce n’est plus très bien vu, d’assumer qu’on n’aime pas les femmes (ni de réclamer qu’elles soient plus silencieuses et dociles). Il est donc peut-être un peu plus difficile de repérer les misogynes qui nous entourent, s’ils n’aborent pas de petit badge lumineux. » (p. 39). Elle propose une réflexion qui ne se contente pas de pointer les injustices. Elle replace les ressentis, les frustrations et les silences dans une perspective collective, encourageant les femmes à reconnaître les violences subies, visibles ou moins visibles et à ne pas toujours porter le fardeau de la compréhension ou du pardon. « Il y a des moments où faire des généralités n’est pas un raccourci facile, mais une simple description de la réalité. Là encore, il faut être sacrément égocentrique pour ne pas savoir réagir que par un « tous les hommes ne sont pas des violeurs! » quand une femme a le malheur de laisser échapper qu’elle en a marre des hommes. Tous les hommes ne sont peut-être pas des violeurs, mais quasiment tous les violeurs sont des hommes – et quasiment toutes les violeurs sont des hommes – et quasiment toutes les femmes ont subi ou subiront des violences de la part des hommes. Il est là, le problème. Elle est là, l’origine de notre détestation, de notre malaise, de notre méfiance. » (p. 40)

Ce qui rend l’essai également fort, c’est sa capacité à synthétiser des idées complexes dans un format accessible. En peu de pages, l’autrice donne à réfléchir sans être excessivement professorale. Le style est incisif mais toujours engagé. Il parvient à créer un espace pour la déconstruction personnelle et collective. Elle incite à repenser les liens avec les hommes dans un monde encore marqué par les inégalités. Comme elle insiste, elle est mariée et amoureuse. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas réfléchir à la misandrie. Et surtout réfléchir aussi à pourquoi la misogynie est quelque chose de normal, après tout un homme tue sa femme ou compagne tous les 4 jours. « En 2017, 90% des personnes ayant reçu des menaces de mort de la part de leur conjoint étaient des femmes. Toujours en 2017, 86% des victimes de meurtre par le conjoint ou de l’ex-conjoint étaient des femmes. En parallèle, sur les 16 femmes qui avaient tué leur conjoint, au moins 11, soit 69% d’entre elles, étaient victimes de violences au sein de leur couple. En 2019, ce sont 149 femmes qui sont mortes assassinées par leur conjoint ou leur ex-conjoint. En 2018, 96% des personnes condamnés pour violences conjugales étaient des hommes et 99% des personnes condamnées pour violences sexuelles étaient des hommes. Les femmes ne sont pas les seules victimes d’agressions sexuelles et de viols. Il est difficile de trouver des statistiques qui abordent les agressions sexuelles perpétrées sur les hommes. » (p. 37). Pourquoi la misandrie choque? bouleverse? La misandrie n’a jamais tuée, elle.

Une lecture très enrichissante qui incite à réfléchir sur le patriarcat et le mot misandrie, assez tabou.

Laisser un commentaire

Bienvenue dans cette immersion dans le monde fabuleux du 9e art.