4 aventures de Spirou et Fantasio – Tome 1 – André Franquin

Spirou et Fantasio ne s’ennuient jamais. Leur quotidien est ponctué de rencontre des plus surprenantes les unes des autres. Par chance, ils s’en sortent toujours indemnes.

4e de couverture
Spirou et Fantasio se retrouvent tour à tour sur un ring de boxe, sur le dos d’un cheval, à faire la chasse au robot et de la médiation de conflit entre deux tribus hostiles.

Mon avis
Quand on commence une série, il est préférable de commencer dans l’ordre. Pour Spirou et Fantasio, bien que les scénaristes se soient suivis, il y a toujours une façon commune de raconter. Les bases, Franquin les a posé dès les premiers tomes. Le premier tome est toujours surprenant tellement le style est différent. Quand on regarde la couverture, on s’en rend compte immédiatement. Et quand on commence à se plonger dans les quatre aventures, on voit transparaître l’esprit d’une autre époque. Mais avant que l’on s’attarde dessus, on sent les influences d’un peu partout. Dans les graphismes, on voit les références à la bd jeunesse du 19e. On s’amuse du clin d’oeil à « Quick et Flupke » avec la reprise exacte de deux cases ou le cheval de Lucky Luke.

Pour savoir qu’elle est le métier de Spirou et Fantasio, le premier tome ne donne pas de réponse. On voit directement Spirou en tenue de groom mais on ne le voit jamais travaillé tout comme son acolyte. Les histoires sont assez étranges et très différentes les unes des autres. La première concerne des criminels voulant les plans d’un robot. Le duo de casse-cou détruit les plans. Puis on voit Spirou se préparer à un combat de boxe. On s’étonne car son adversaire est un adolescent. Forcément, le héros est honnête et s’en sort gagnant. Par la suite, c’est une histoire de cheval rebelle qui sera par la suite enfermée. C’est censé être drôle. Mais vouloir dresser un animal contre sa nature car cela ne l’arrange pas n’est pas très drôle. Et enfin, on termine avec une aventure chez les pygmées. On se rapproche de l’esprit de « Tintin au Congo ».

On commence avec la présence d’un léopard dans une résidence privée. Il est normal d’avoir chez soi un animal sauvage pour son plaisir. Le propriétaire l’a sciemment retiré de son milieu pour l’emmener dans un autre pays, comme si c’était un chien de compagnie. Les héros qui découvrent que l’anomal appartient à un homme riche, décident de nettoyer l’animal et lui couper les moustaches. Qu’est-ce qu’il y a de drôle de modifier l’apparence d’un animal ce n’est pas une poupée. C’est un vrai manque de considération pour la bête. Les moustaches permettent d’avoir des repères dans l’espace. Et après les potes se déguisent en mettant leurs plus beaux habits pour donner l’illusion d’une valeur sociale. Ce n’est que la cerise sur le gâteau à grosse tendance raciste.

Ce cher monsieur très riche est propriétaire d’une île sur laquelle vive des pygmées. Le souci c’est qu’il y a la guerre et qu’il n’arrive pas à arrêter les conflits. Il y a deux tribus qui ont juste une couleur de peau différente. « Dans la plaine, à l’ouest du fleuve Panga, vivent les lilipangus, bruns de peau. Ils sont éleveurs de bétail et cultivateurs. C’est dans la plaine que j’ai ma capitale, Lilipanga, 237 habitants… Vous voyez, en vert sur le carte, la forêt qui couvre le reste de l’île jusqu’aux flancs du mont Lilipango, c’est lilipangués! Farouches chasseurs à peau noire. Ils sont ennemis mortels de mes lilipangus! Bien que les deux tribus parlent la même langue et observent pas mal de traditions communes, les bruns méprisent les noirs comme une race inférieure… En revanche, les noirs les détestent, et c’est une guerre perpétuel! Quand la chasse est mauvaise, les noirs font des incursions dans la plaine, raflent le bétail, pillent récoltes et villages! Par mesure de représailles, les bruns allument des incendies de forêt et essayent de détruire le gibier dont vivent les noirs!… J’ai tout fait, messieurs, pour qu’ils vivent en bonne entente! Mais le mal est plus fort que moi! Mes émissaires se font rosser! L’accès de la forêt m’est interdit! Je suis seul devant une tâche qui…  » (p. 57).

Spirou et Fantasio vont changer les choses forcément. A quel titre? Qu’elles sont les critères qui les identifient comme expert? Une fois sur place, ils sont présentés comme des référents. « Bonjour, mes enfants! N’ayez pas peur, les deux autres chefs blancs sont mes amis des lilipangus! » (p. 59). Deux phrases lourdes de remarques où l’on infantilise les autochtones trop bêtes pour se gérer tout seul et raciste avec les gentils blancs qui sont là pour eux. Après on a le droit à une blague hygièniste assez limite. Les noirs sont juste sales. Quand les trois gentils blancs les lavent, les voilà comme les autres. Tout était une question de propreté. « Regarde!… Les noirs ne sont pas noirs!.. ce sont des bruns… qui ne sont jamais lavés! tu comprends?… » (p. 66). Heureusement que l’on échappe à ce que l’on appelait à une autre époque « le petit nègre ». Les autochtones s’expriment normalement. Par contre, les pygmées qui sont au service du maître dans sa demeure en Belgique. On a le droit à une remarque sur le fait qu’ils ne peuvent pas être totalement civilisé puisqu’ils refusent de quitter leur pagne tout en portant une chemise et veste de serviteur. Nous voilà plonger dans la vision des années 50 d’une société post-guerre qui doit se reconstruire en gardant les bases d’un monde qui va changer.

Pour ce qui est de la représentation des femmes, on est encore dépité, bien qu’il y en a plus que les tomes suivants. Mais les clichés ont la vie dure. Forcément la mégère est très présente. Elle parle à la place de son mari qu’elle opprime dans leur appartement. Lui est propriétaire et elle gère les locataires en passant son temps à les surveiller, les critiquer et leur faire des remarques déplacées. Chez les pygmées, les femmes doivent faire le nettoyage et la cuisine avant l’arrivée des blancs pour bien se faire voir. Il n’est pas question de faire ensemble mais de déléguer aux femmes. Pour la fête, des femmes vont se préparer pour être la plus belle. Elles prennent un temps infini car leur identité se résume au désir provoqué chez les hommes. « Vite, nana! Fais ma coiffure! Il y a un grand conjo ce soir! Il faut que la princesse Umbilla ait la plus belle tête de toue la ville!! » (p. 60). On voit aussi des fillettes à qui l’on apprend à être des plantes vertes, d’avoir des vêtements qui les empêchent de courir jusqu’à leur interdire de regarder de la boxe car trop violent pour elles. Un constat qui est dans la continuité des éléments précédents et réducteurs.

Une bd étonnante qui pose les bases d’une série qui a changé dans le temps avec l’évolution de la société.

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