Soixante printemps en hiver – Aimée de Jongh et Ingrid Chabbert

Parfois, on a un déclic et tout change. C’est le cas de Josy qui prend une décision qui bouleverse sa famille. Elle part de la maison séance tenante.

4e de couverture
Le jour de son 60e anniversaire, Josy refuse de souffler les bougies de son gâteau. Sa valise est prête. Elle a pris une décision : celle de quitter mari et maison pour reconquérir sa liberté en partant avec son vieux van VW ! Sa famille, d’abord sous le choc, n’aura dès lors de cesse de la culpabiliser face à ce choix que tous considèrent égoïste. Josy va heureusement tenir bon, trouvant dans le CVL (« Club des Vilaines Libérées ») des amies au destin analogue et confrontées à la même incompréhension sociétale… Mais cela suffira-t-il pour qu’elle assume sa soif d’un nouveau départ ? Et qu’elle envisage peut-être même un changement d’orientation sexuelle ? Oui, si l’amour s’en mêle. Ou pas…
Aimée De Jongh et Ingrid Chabbert composent la peinture subtile, touchante et moderne d’une crise de la soixantaine au gré d’un road movie impossible à lâcher avant sa conclusion. Un « Aire Libre » surprenant, osant traiter le tabou du changement de vie et d’orientation sexuelle…

Mon avis
Ingrid Chabbert propose une histoire très originale et touchante. Il est rare de voir des séniors et surtout sans côté potache comme chez Fluide Glaciale. La scénariste apporte beaucoup de délicatesse et d’affection à son héroïne : Josy. Le jour de ces 60 ans, ses enfants et ses petits-enfants sont là avec un gâteau pour fêter son anniversaire. Elle fait une annonce qui prend de court tout le monde. Elle décide de partir avec son van Volkswagen des années 70 pour vivre une expérience de bohème. Quand elle trouve un espèce pour se garer, elle rencontre une jeune maman vivant une camionnette avec son bébé. Très vite, un lien d’amitié fort se créer entre elles. Grâce à elle, elle rencontre une bande de copine et aussi l’amour. Aimer une femme semblait impossible et pourtant. On félicite Aimée de Jongh de proposer une scène d’amour entre femmes âgés pleine de tendresse et de romance. C’est aussi inhabituel comme représentation. Mais tout va trop vite et elle se sent perdu.

Ses enfants ne sont pas dans la bienveillance. Ils soutiennent leur père qui est tout seul et qui ne sait pas se débrouiller tout seul. Ils veulent la culpabiliser surtout qu’elle doit aussi garder ces petits enfants. Si elle n’est pas là qui va s’en occuper. Personne ne cherche à comprendre son geste. Comme si à partir d’un certain âge, elle doit occuper le rôle qu’on lui donne. Elle n’est plus une personne capable de réfléchir, de penser et de ressentir. Pourquoi devrait-elle se contenter de l’image de pot de fleur jusqu’à sa mort? On sent fortement cette rupture où la bienveillance n’a plus sa place depuis très longtemps. La mère est déçue de ces enfants si égoïste et narcissique. On le voit très bien dans la réaction de sa progéniture. Impossible de ne pas être affecté par cette situation où transpire la solitude et l’isolement.

Il n’est pas facile de faire des choix et de les assumer. Commencer vraiment à 60 ans demande un temps d’adaptation. Malheureusement, a force d’hésiter on peut perdre des opportunités à jamais. Son amoureuse est morte. Aurait-elle dut la quitter? N’a t’elle pas fait une grave erreur? Sous le choc, elle fait un malaise. A son réveil à l’hôpital, sa famille est là. Elle se sent obligé de rentrer à la maison et de reprendre son train-train quotidien. Rapidement, elle sait qu’elle refuse cela. Sa décision est prise et plus jamais, elle ne fera marche arrière. Une détermination forte qui ravie le coeur des lecteurs. Il n’est jamais trop tard pour conquérir sa liberté. Le graphisme est très précis et très réaliste, avec le souci des détails. Les couleurs contribuent à cette ambiance détendue et sincère. Le duo nous a séduit par cette singulière production qui redonne de l’espoir.

Une bande dessinée atypique qui parle de prise de liberté à 60 ans. Il n’y a pas d’âge pour essayer de vivre enfin sa vie.

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